Le contexte
En l’espèce, un couple avait, par acte authentique de donation-partage, transmis à leurs deux enfants la nue-propriété de 20 000 actions dont ils avaient conservé l’usufruit.
Deux ans plus tard, la société a procédé dans le cadre d’une réduction de capital au rachat de ces actions : l’usufruit et la nue-propriété étant cédés simultanément. Depuis le 1er janvier 2015, une opération de réduction de capital est fiscalisée dans la catégorie des plus-values de cession de valeurs mobilières, les règles en matière de plus-values démembrées sont donc identiques.
Qui est redevable de l'imposition sur la plus-value mobilière ?
À la suite d’un contrôle sur pièce, l’administration a notifié au couple des cotisations supplémentaires au motif que la plus-value générée était intégralement imposable entre les mains de l’usufruitier contrairement à ce qu’affirmaient les redevables au motif du remploi ultérieur des sommes. La position de l’administration a été suivie par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise mais non par la cour administrative d’appel de Versailles qui a prononcé la décharge des impositions.
Le Conseil d’État commence par rappeler qu’en cas de cession simultanée de l’usufruit et de la nue-propriété, l’imposition de la plus-value est, en principe, répartie entre l’usufruitier et le nu-propriétaire selon la valeur de leurs droits respectifs.
Cependant, lorsque les parties ont prévu par convention un report du démembrement par remploi du prix de cession pour l’acquisition d’un autre bien, le Conseil d’État opère la distinction suivante :
- Si la convention ne prévoit qu’une faculté de remploi, l’unique redevable de l’imposition sur le plus-value générée par la cession des titres est l’usufruitier ;
- En revanche, si elle prévoit une obligation de remploi, l’unique redevable est alors le nu propriétaire.
Ainsi, l’usufruitier ne peut se prévaloir du seul remploi des sommes pour échapper à l’impôt si ce remploi ne lui est pas imposé par un accord.
Une importance toute particulière doit être accordée à la rédaction de la clause de remploi
En l’espèce, le Conseil d’État juge que l’obligation de remploi est insuffisamment définie en l’absence de quantum des titres visés par le remploi et que le remploi, non imposé par un accord, résulte bien de la propre initiative de l’usufruitier. Dès lors, le redevable de l’imposition de la plus-value est l’usufruitier seul. L’arrêt de la cour administrative d’appel est annulé.
Cet arrêt vient confirmer l’importance qui doit être accordée à la rédaction de la clause de remploi en cas de cession démembrée et les diligences notariées à apporter à la rédaction de l’acte de donation.
CE 02/04/2021 n°429187
Par Delphine Apostoly
Achevé de rédiger le 04/05/2021