Un des plus grands risques macro-économiques à long-terme
L’augmentation de la température moyenne pour la décennie 2006-2015 par rapport à l’ère pré-industrielle était déjà d’environ 0,9 degré1. Or, compte tenu des émissions en cours (53,4 milliards de tonnes par an2), nous serions plutôt sur une trajectoire de réchauffement moyen à horizon 2100 de +2 degrés, voire +4 degrés pour les prévisions les plus pessimistes.
Le réchauffement a pour conséquence directe l’augmentation du niveau des océans (impactant les millions de personnes vivant sur les zones côtières et les deltas), l’intensification des périodes de températures extrêmes, de sécheresse mais aussi d’inondations, aggravant les incendies de forêts, acidifiant les terres et les mers, engendrant une raréfaction des ressources alimentaires et l’approvisionnement en eau potable.
Au niveau macro-économique, cela est susceptible d’aggraver les crises migratoires, en devenant une problématique tant économique que politique. Le Forum Economique Mondial a ainsi classé le changement climatique comme le plus grand risque mondial3.
Plusieurs stratégies d’investissement
Comment peut-on tenir compte de cette contrainte dans la gestion de portefeuille et investir pour accélérer la mutation écologique de l’économie ?
Une première approche consiste à exclure de son portefeuille les activités fortement émettrices de CO2 (pétrole, charbon, transport, chimie, etc.) que ce soient dans leurs opérations propres, à travers leur consommation d’énergie, voire celles qui résultent indirectement de leur activité (par exemple l’automobile). Cette méthode de désinvestissement a pour avantage de déprécier les actifs « carbonés », dont notamment les réserves d’énergie fossile. L’impact d’une telle approche pourrait être potentiellement renforcé par l’action des pouvoirs publics qui, via l’outil réglementaire, renchériraient le prix du carbone, condamnant à terme ces actifs (« stranded-asset »). Cependant, cette approche n’accompagne pas le changement de comportement des émetteurs. Et surtout, en voulant à tout prix réduire l’empreinte carbone d’un portefeuille de manière radicale, revient à concentrer le portefeuille trop fortement sur certains secteurs à faible intensité carbone par nature (banques, assurances,...) sans soutenir le processus de transition de chaque secteur.
À l’opposé du désinvestissement, l’engagement actionnarial consiste à investir tout en faisant pression et dialoguer avec les managements des entreprises de façon à diminuer leur empreinte carbone. Des lobbies d’investisseurs tels Climate Action 100+ mènent des actions en ce sens. Ce dialogue s’applique non seulement en tant qu’actionnaire mais aussi en tant que prêteur (obligations vertes, dette privée, dette bancaire) notamment dans l’indexation des termes du contrat de prêt à des objectifs de réduction des émissions de CO2.
Enfin, une démarche « positive » d’investir pour le climat consiste à financer les entreprises facilitant la transition énergétique : énergie solaire, éolienne, véhicules électriques, bornes de recharges, batteries, semi-conducteurs à faible consommation d’énergie, réseaux de distribution électriques, matériaux de construction isolant,... Les annonces de plans, tel le Pacte Vert pour l’Europe et l’appel aux plans de relance « vert » post covid, sont une aubaine pour ces secteurs.
Une source de risque directe pour l’investisseur
Le changement climatique peut être un souci éthique pour certains ou une opportunité d’investissement pour d’autres. Il est aussi une source de risque pour l’investisseur4 :
- Risque physique et juridique sur les actifs, comme l’a illustré la faillite de la compagnie d’électricité californienne Pacific Gaz and Electric, suite aux dommages considérables résultants de ses négligences lors des incendies de Camp Fire de 2018, dommages accentués par les longues périodes de sécheresse préalables,
- Risque de transition énergétique pesant sur les entreprises encore trop tournées vers les énergies fossiles et qui seraient prises de court par l’apparition de réglementation auxquelles elles ne seraient pas suffisamment préparées.
Des fonds labellisés pour contribuer à la transition énergétique
L’investissement devient ainsi un facteur important pour atténuer l’impact négatif de l’activité humaine sur le climat, en choisissant de financer ou non les investissements décarbonés des entreprises. Ainsi investir dans des fonds d’investissements labellisés ISR ou Greenfin (que ce soit sur les classes d’actifs actions, obligations, immobilier et peut être demain Private Equity) permet de contribuer à la transition énergétique de nos économies.
Par Jean-Patrick Mousset
Achevé de rédiger le 02/09/2020