Certainement parti de Chine fin 2019, le virus du Covid-19 se répand au reste du monde début 2020. Les marchés boursiers prennent conscience de l’ampleur de la crise à partir de février 2020.
Les premières semaines de la pandémie ont vu l’ensemble des marchés financiers baisser fortement pour atteindre un point bas fin mars 2020 à -20% sur le MSCI World (au 31/03/2020). Dès lors, ils se sont fortement repris jusqu’à janvier 2022 pour atteindre un plus haut à +35% (au 31/12/2021). L’année 2022 aura été celle d’un retour à la normale avec une baisse sur l’ensemble des bourses. Sur la période de 2020 à 2022, l’indice MSCI World a progressé de 16% en euros.
Evolution du MSCI World du 31/12/2019 au 30/12/2022 (en base 100, en euros)
Source : Bloomberg. Données au 30/12/2022, dividendes non réinvestis. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures et ne sont pas constantes dans le temps
Que s’est-il passé pendant la pandémie ?
Le Covid-19 et les confinements ont tout d’abord rebattu les cartes en accélérant ou en stoppant l’activité de certains secteurs. Cette situation inédite a fait émerger des gagnants principalement dans le secteur de la santé (recherche, tests, vaccins), du digital (e-commerce, paiement, divertissement) et de la consommation avec le luxe.
Le premier secteur auquel pense l’investisseur est la santé
Les développeurs de vaccins à ARN messager, comme Moderna ou Pfizer-BioNTech, ont évidemment compté parmi les grands gagnants. Plusieurs autres sous-secteurs ont également connu une forte demande pour accompagner la recherche sur le virus, le développement de vaccins et la production de tests. Les entreprises présentes sur le diagnostic, la biologie ou encore les équipements de laboratoire figurent parmi les grands bénéficiaires des dépenses de recherche engagées sur la période.
Evolution des chiffres d'affaires (en milliards, devises locales)
Source : Bloomberg.
Sartorius Stedim, fournisseur de matériel pour laboratoire, a ainsi vu son chiffre d’affaires progresser de 143% entre 2019 et 2022. Thermofisher, leader sur la biologie et qui vend, entre autre, des machines servant à l’analyse du vivant comme pour les tests PCR, affiche un chiffre d’affaires en croissance de 72% sur la même période.
Evolution des valeurs du 31/12/2019 au 30/12/2022 (en base 100, devises locales)
Source : Bloomberg. Données au 30/12/2022. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures et ne sont pas constantes dans le temps
Cette forte croissance d’activité a été saluée en bourse en 2020 et 2021 avant de redescendre en 2022. Sur les 3 ans de la période du Covid (2020 à 2022), l’action Moderna a progressé de près de 818%, Sartorius Stedim de 105%, et Thermo Fisher de 70%.
Regardons du côté du digital avec l’exemple du e-commerce
Evolution des chiffres d'affaires (en milliards, devises locales)
Source : Bloomberg.
En 2020, les confinements ont poussé les consommateurs à réorienter une partie de leurs dépenses vers le e-commerce avec la fermeture des magasins. L’année 2021 a aussi connu une forte croissance portée par une consommation post-confinement très solide grâce au surplus d’épargne d’une grande partie de la population mondiale. Ce n’est qu’en 2022 que la situation se normalise avec les réouvertures générales et de forts effets de base de comparaison.
En 2022, le chiffre d’affaires d’Amazon qui provenait à 87% de son activité de e-commerce (en propre et pour compte de tiers) est supérieur de 82% à celui de 2019 ! Cette évolution est encore plus marquante pour les acteurs de petite taille. L’entreprise Etsy, fonctionnant comme un marché digital où les artisans du monde entier mettent en vente leurs produits en payant une commission sur leurs ventes, a vu son chiffre d’affaires bondir de 206%. Le groupe Shopify a développé une offre pour proposer à n’importe quel commerçant d’ouvrir un site marchand personnalisable à son image en quelques clics. En échange d’un abonnement mensuel et d’une commission sur les ventes, le commerçant bénéficie d’une solution clé en main. L’activité du groupe a elle aussi décollé avec +250% de chiffre d’affaires sur la période
Evolution des valeurs du 31/12/2019 au 30/12/2022 (en base 100, devises locales)
Source : Bloomberg. Données au 30/12/2022. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures et ne sont pas constantes dans le temps
Sur le plan boursier, les performances ont elles aussi été impressionnantes en 2020 et 2021 : Amazon progresse de 80%, Shopify de 46% et Etsy de 394% (du 31/12/2019 au 31/12/2021). L’année 2022 a une nouvelle fois fait redescendre les valorisations. Deux de ces trois gagnants du Covid finissent ainsi sous leurs niveaux boursiers du début 2020 : Amazon -9% et Shopify -13%.
Bien que cela ne soit pas intuitif, le secteur du luxe a lui aussi profité de la période
Comme beaucoup de secteurs non essentiels, les entreprises du luxe ont commencé par souffrir de la pandémie. L’arrêt du tourisme, les confinements et les fermetures de boutiques ont causé d’importantes baisses de chiffre d’affaires sur l’année 2020.
Le rebond de 2021 a lui été très vigoureux notamment porté par le besoin « d’achat revanche » (revenge buying) après une année de privation ; il a été exacerbé par la forte épargne des consommateurs. Ce rebond s’est poursuivi en 2022 avec une demande toujours aussi robuste. Le consommateur américain a même pris le relais du consommateur asiatique et chinois tenu à l’écart du marché par les politiques zéro Covid.
Evolution des chiffres d'affaires (en milliards, devises locales)
Source : Bloomberg.
Hermès, champion du secteur du luxe, a réalisé un chiffre d’affaires en 2022 de 11,5 milliards d’euros soit 67% de plus qu’en 2019. LVMH et Kering affichent également des croissances soutenues (+41% pour LVMH et +30% pour Kering).
Evolution des valeurs du 31/12/2019 au 30/12/2022 (en base 100, devises locales)
Source : Bloomberg. Données au 30/12/2022. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures et ne sont pas constantes dans le temps
2020 et 2021 ont été de très bonnes années pour Hermès (+131%) et LVMH (+76%). Kering à +21% est resté en dessous de ses grands rivaux. En 2022, Hermès, LVMH et Kering ont tout d’abord marqué le pas comme une grande partie du marché. La deuxième partie de l’année a cependant fait le tri et vu remonter en flèche les deux leaders.
Hermès termine cette période de Covid à +117% et LVMH +64% (du 31/12/2019 au 30/12/2022). Kering, davantage porté sur la mode avec Gucci et Balenciaga, peine à acquérir son statut de groupe de luxe intemporel. Le groupe, qui fait face à une problématique de créateur, termine la période à -19%, sous son niveau de janvier 2020.
Maintenant que la pandémie a beaucoup reculé, et même si nous manquons encore de recul, nous pouvons essayer de tirer certaines conclusions. Où en sommes-nous ? Le marché présente d’abord des gagnants « temporaires ». C’est notamment l’exemple de la santé (Danaher, Sartorius) ayant vu une percée des ventes avec une courbe « en cloche », dégonflée après le Covid. Nous ne minimisons pas pour autant les avancées médicales telles que le vaccin ARN messager qui en a émergé. Nous voyons aussi des gagnants « intermédiaires » comme le e-commerce : un secteur ayant connu de très fortes hausses d’activités et dont les chiffres d’affaires ne progressent plus que modérément aujourd’hui. Enfin, il existe des gagnants à venir (et même d’avenir…) comme par exemple le luxe, à qui la pandémie a donné de l’élan et qui continue de voir son activité s’envoler.
Achevé de rédiger le 16/02/2023 par Marin Louvigné, gérant de portefeuilles.