Un phénomène mondial
Les prix augmentent ! Le prix du litre de diesel est passé de 1,20€ à 2,15€. Un caddie rempli de courses au supermarché coûtait 108€ en janvier 2021 ; il coûte désormais 120€ d’après le journal La Voix Du Nord. Changer de voiture est également plus onéreux : une Peugeot 208 vaut aujourd’hui 3 000€ de plus qu’il y a un an. D’après l’Insee, les prix à la consommation ont progressé en France de 5,2% en mai. L’inflation s’établit à +8,6% aux États-Unis, +7,9% en Allemagne, +9,1% en Angleterre. Ce phénomène est donc mondial.
Une offre qui ne suit pas la demande
Quelles sont les causes de cette hausse des prix partout dans le monde ?
La première explication de la hausse généralisée des prix se trouve probablement dans la très forte reprise économique après deux années de confinements successifs.
En effet, en 2020 et 2021, les ménages ont fortement diminué leur consommation du fait de la pandémie de Covid-19. De ce fait, ils ont accumulé un niveau d’épargne très important. Par exemple, fin 2021, les ménages français disposaient de plus de 300 milliards d’euros sur leurs comptes en banque. Cet excès d’épargne a été possible grâce à l’aide des banques centrales. Ces dernières ont, en effet, créé ex-nihilo de la monnaie et ont acheté avec cette monnaie nouvellement créée des obligations d’État. Sans elles, les États n’auraient donc pas pu emprunter à des taux aussi bas et prendre à leur charge les salaires des employés confinés ou encore envoyer des chèques de stimulus à la population comme ce fut le cas aux États-Unis.
Mais une fois la pandémie et les campagnes de vaccination terminées, la demande est très vite repartie. Les ménages ont tout de suite commencé à dépenser cette manne accumulée. Les consommateurs sont retournés au restaurant, ont voyagé de nouveau, refait leur intérieur, déménagé ou encore changé de véhicule.
Malheureusement, l’offre n’a pas suivi au même rythme. En effet, remettre en route une usine, recruter des serveurs ou encore transporter un container de l’Asie vers l’Europe prend du temps ! Cette distorsion, entre une demande vigoureuse d’un côté et une offre qui de l’autre côté tardait à arriver, a fait monter l’ensemble des prix pour les biens et les services.
Plus récemment, en 2022, ce phénomène que beaucoup pensait temporaire a été accentué par deux événements : la guerre en Ukraine et le re-confinement en Chine.
La guerre en Ukraine
Le conflit russo-ukrainien a eu de nombreuses répercussions sur les prix des matières premières. Le cours du baril de Brent est passé de 77$ à 120$ les jours qui ont suivi le début du conflit. Le cours du gaz en Europe s’est envolé passant de 23$ en début d’année à 40$ aujourd’hui. Le cours du blé a atteint 430€ en mai contre 250€ en début d’année.
Pourquoi une telle augmentation ? Parce que la Russie et l’Ukraine sont d’importants producteurs de matières premières. La Russie est le deuxième exportateur de pétrole et le premier exportateur de gaz au monde. L’Ukraine, quant à elle, est un important producteur de denrées agricoles.
Le conflit crée de nombreuses incertitudes. Le blé ukrainien va-t-il pouvoir être exporté malgré le blocus russe en Mer Noire ? L’Europe peut-elle se priver en si peu de temps de 40% de ses importations de gaz naturel ? La Russie peut-elle fermer complètement le robinet du gaz ? L’Europe peut-elle se fournir en engrais azotés, dérivés du gaz naturel et ainsi maintenir ses rendements agricoles ?
De cette hausse des matières découle une hausse des coûts de l’ensemble des produits que nous consommons (nourriture, chauffage, transports etc.) que les industriels répercutent, autant que faire se peut, aux consommateurs finaux.
Le re-confinement en Chine
Le deuxièmement évènement qui a accéléré la distorsion entre l’offre et la demande évoquée ci-dessus est le re-confinement en Chine en raison de la recrudescence des cas de Covid-19 en mars 2022.
Cette mise sous cloche de la deuxième économie mondiale a de nouveau eu des répercussions sur la production industrielle et la logistique mondiale. En mai, le grand armateur danois Maersk, fait état de retard sur les transports en Chine intérieure de 3 à 5 jours en raison d’un manque de conducteurs de camion ayant un test covid négatif.
De même, la production industrielle a fortement décéléré : -2,9% d’après les statistiques officielles. Les usines et les ports ont tourné au ralenti pendant 3 mois ce qui a eu comme conséquence de renchérir les coûts de production et de transport.
Des relocalisations
La très forte reprise économique, la guerre en Ukraine et le re-confinement chinois sont trois facteurs qui peuvent expliquer l’inflation actuelle.
Un dernier facteur pourrait également engendrer des hausses de prix à long terme. Il s’agit des relocalisations de certaines productions en Europe et aux États-Unis.
Cette tendance, qui a comme corollaire un meilleur respect de critères environnementaux et des coûts de production plus élevés, pourraient entraîner des hausses durables des prix à la consommation.
Achevé de rédiger le 05/07/2022 par Nicolas Levrier, gérant de portefeuilles, au sein de Dubly Transatlantique Gestion.