A l’instar d’autres États européens, la France a instauré un régime fiscal de faveur, afin d’inciter les salariés et dirigeants à fort potentiel et souvent mobiles à s’installer en France pour y exercer une activité professionnelle. Il s’agit du régime des impatriés.
Le Conseil d’Etat vient de préciser les exonérations dont les personnes impatriées peuvent bénéficier.

Par un arrêt du 21 octobre 2020, le Conseil d’ État a annulé la doctrine administrative qui conditionnait le bénéfice de l’abattement de 50% sur certains revenus patrimoniaux de source étrangère au bénéfice de l’exonération de la prime d’impatriation.

Qui est concerné par le statut fiscal d’impatrié ?

Pour rappel, les salariés s’installant en France depuis le 1er janvier 2008 peuvent bénéficier, sous certaines conditions, d’un régime fiscal de faveur en matière d’impôt sur le revenu prévu à l’article 155 B du code général des impôts (CGI).

Les salariés concernés sont ceux appelés de l’étranger à occuper un emploi dans une entreprise établie en France. Il s’agit de personnes :

  • venant travailler en France dans le cadre d’une mobilité intra-groupe, mais aussi
  • directement recrutées à l’étranger par une entreprise établie en France.

Ces personnes ne doivent pas avoir été résidentes fiscales de France au cours des 5 années civiles précédant celle de leur prise de fonction et doivent, à compter de leur prise de fonction, devenir résidents fiscaux de France.

Ce dispositif prévoit une exonération partielle des revenus d’activité et de certains revenus patrimoniaux de source étrangère.

Quelle exonération sur les revenus d’activité ?

Il s'agit du lieu où les contribuables ont effectué leurs principaux investissements, où ils possèdent le siège de leurs affaires, d'où ils administrent leurs biens. Ce peut être également le lieu où les contribuables ont le centre de leurs activités professionnelles ou d'où ils tirent, directement ou indirectement, la majeure partie de leurs revenus.

Suite à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme A pour les années 2007 et 2008, l’administration fiscale avait estimé qu’ils devaient être considérés comme résidents fiscaux français et non belges, comme le soutenaient les époux, mettant à leur charge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux.

M. et Mme A ont porté l’affaire devant le tribunal administratif, puis devant la Cour d’appel administrative, avant de se pourvoir en cassation.

En l’espèce, la Cour d’appel administrative avait estimé que ni leur foyer et ni leur activité professionnelle ne se situaient en France, mais qu’ils y possédaient toutefois le centre de leurs intérêts économiques au regard des sociétés et des biens immobiliers qu’ils y détenaient.

Le patrimoine détenu en France est-il productif ?

L’exonération d’impôt sur le revenu concerne les éléments de la rémunération des salariés directement liés à l’exercice de leur activité en France (prime d’impatriation). La rémunération imposable de l’impatrié ne doit, toutefois, pas être inférieure à celle versée au titre de fonctions analogues dans la même entreprise ou, à défaut, dans des entreprises similaires établies en France.

Une fraction de la rémunération se rapportant à l’activité exercée à l’étranger peut également bénéficier d’une exonération d’impôt sur le revenu.

Cependant, pour les contribuables qui bénéficient d’une prime d’impatriation et qui exercent à la fois leur activité en France et à l’étranger, le montant de l’avantage fiscal total est plafonné.

Quelle exonération sur les revenus de source étrangère ?

Le dispositif prévoit l’exonération d’impôt sur le revenu (et non de prélèvements sociaux) pour la moitié de leur montant de trois catégories de revenus patrimoniaux de source étrangère. Il s’agit :

  • des revenus de capitaux mobiliers
  • des plus-values de cessions de valeurs mobilières et de droits sociaux lorsque le dépositaire des titres, ou à défaut la société dont les titres sont cédés, est établi hors de France.
  • des produits de droits d’auteur, de propriété industrielle.

Le paiement de ces sommes doit avoir été effectué par une personne établie hors de France dans un Etat ou un territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale.

Quel changement prévoit l’arrêt du Conseil d’État ?

L’administration estimait que les impatriés ne percevant pas de prime d’impatriation exonérée sur la base de l’article 155 B ne pouvaient obtenir l’abattement de 50% sur leurs revenus passifs et leurs plus-values de cession de valeurs mobilières.

Le Conseil d’État considérant qu’il s’agissait d’un ajout par rapport à la loi a annulé cette doctrine. Dès lors, l’abattement de 50 % des revenus passifs et des plus-values de cession de valeurs mobilières s’applique quand bien même l’impatrié n’aurait pas, au cours de la même année, de prime d’impatriation exonérée.

Conseil d’État 21 octobre 2020, n°442799

Par Delphine Apostoly


Achevé de rédiger le 18/11/2020